Face à la menace jihadiste, la Tunisie découvre la difficulté d'informer
Publié : 1er juin 2015 à 14h15 par La rédaction
Confrontée à la multiplication des violences jihadistes, la Tunisie vit un dilemme classique mais épineux: comment concilier droit à l'information et sécurité dans le seul pays du "Printemps arabe" à avoir consacré la liberté d'expression.
"Terrorisme et liberté de la presse sont deux choses nouvelles en Tunisie", constate Mohamed Fehri Chelbi, enseignant à l'Institut de presse et des sciences de l'information (IPSI). D'où les cafouillages, chez les médias comme chez les autorités, qui accompagnent souvent les violences.
Dernier exemple en date, la cacophonie qui a suivi des coups de feu entendus depuis une caserne à Tunis le 25 mai. Aussitôt, des médias annoncent "une attaque terroriste".
Certains évoquent des affrontements entre militaires et hommes armés dans la caserne et le quartier voisin. D'autres assurent que des femmes sont parmi les assaillants. Mais rapidement, il s'avère que c'est un caporal déséquilibré qui a abattu huit camarades avant d'être tué.
Ces versions diverses et variées ont suscité la colère sur les réseaux sociaux, un internaute allant jusqu'à publier ce tweet ironique: "URGENT: des journalistes terrorisent la population".
Une "précipitation" dénoncée par le porte-parole du ministère de la Défense, Belhassen Oueslati, pour qui "la publication d'informations erronées et de récits contradictoires donne lieu à une multiplication d'interprétations et provoque l'inquiétude de l'opinion publique". Les risques du métier, se défendent ces médias, d'autant que les autorités elles-mêmes relaient régulièrement des informations contradictoires, comme lors de l'attaque le 18 mars du musée du Bardo. Ministres et porte-paroles s'étaient alors succédé devant les caméras pour annoncer des bilans et des scénarios différents et erronés. "Pourquoi sommes-nous insultés et décrédibilisés alors que nous n'avons fait que notre travail, en donnant rapidement une information recueillie auprès de sources officielles et/ou fiables?", se demande le site Business News, qui avait mentionné les femmes armées avant de mettre à jour son article.