France : Face aux "peurs", Hollande vante l'apport de l'immigration à la République
Modifié : 16 décembre 2014 à 14h19 par La rédaction
Pour son premier grand discours sur l'immigration deux ans et demi après son élection, François Hollande a fustigé lundi ceux qui agitent la peur d'une "dislocation" de la France ou des accords de Schengen pour vanter au contraire l'apport des immigrés à la République.
Sept ans après son ouverture, le chef de l'Etat inaugurait à Paris le Musée de l'histoire de l'immigration qui, victime d'un destin mouvementé, n'avait jamais encore été officiellement inauguré.
Devant un parterre de plusieurs centaines de personnes, François Hollande a dénoncé dans un discours d'une cinquantaine de minutes un "sentiment de dépossession, entretenu avec malice sinon avec malignité". Un Français sur quatre est issu de l'immigration, a-t-il relevé, soulignant sa volonté de "rappeler aux Français d'où ils viennent, quelles sont les valeurs qu'ils portent comme citoyens français et où nous voulons aller ensemble".
François Hollande a ainsi exhorté à ne pas laisser "la place vide pour des discours qui instrumentalisent la peur de la dissolution, de la dislocation, de la disparition" entretenus par ceux "qui rêvent d'une France en petit, une France en dépit, une France en repli, bref une France qui ne serait plus la France".
"Nous devons lutter contre ces thèses au nom de la France (...), pour une France à la hauteur de son histoire et capable de porter un grand projet, un destin", a-t-il martelé.
Le chef de l'Etat s'est de nouveau déclaré "favorable" au droit de vote des étrangers. Mais "rien ne peut se faire sans une révision de la Constitution, ce qui suppose une majorité des 3/5e" au Parlement, a-t-il rappelé, soulignant que cela supposait "un accord entre les forces républicaines".
"A elles de prendre leurs responsabilités", a-t-il lancé.
Il s'est aussi implicitement opposé à Nicolas Sarkozy, sans prononcer son nom, jugeant qu'il fallait "défendre" le principe des accords de Schengen qui autorisent la libre circulation des citoyens au sein de l'Union européenne plutôt que de les "faire éclater".
"Faire éclater Schengen? Ce serait reculer, rétablir les frontières pays par pays", a fait valoir François Hollande, jugeant au contraire que ces accords avaient "permis à tous les pays d'Europe de s'organiser pour contrôler l'immigration".
Le président s'est également élevé contre "la peur sciemment installée d'une religion, l'islam, qui, d'une façon inacceptable, est présentée par certains comme incompatible avec la République".
"Le fait nouveau, ce sont des vents mauvais qui soufflent de plus en plus, pas seulement en France, mais partout en Europe", a-t-il déploré, estimant qu'il fallait "une fois encore reprendre le combat".
Dans "la lutte contre le racisme et l'antisémitisme" érigée en "grande cause nationale", la France "ne peut tolérer qu'un citoyen soit agressé pour sa religion, sa couleur de peau, ses origines", a-t-il souligné, avertissant que "rien ne doit être passé sous silence, rien ne doit rester impuni, rien ne doit être toléré".
François Hollande, selon son entourage, savait son "discours très attendu sur un sujet hautement sensible, complexe, et important".
L'UMP Brice Hortefeux avait d'ailleurs donné le ton d'inévitables polémiques dès lundi matin, reprochant à l'exécutif socialiste d'accepter "l'augmentation du nombre d'étrangers venant chaque année dans notre pays".
"Au lieu d'inaugurer un musée de l'immigration, François Hollande devrait lutter contre l'immigration qui est un problème monumental, économique, social et culturel", a renchéri le numéro 2 du FN, Florian Philippot, sur France Inter.
Mais pour l'historien Benjamin Stora, président du Conseil d'orientation du musée et qui passe pour avoir l'oreille du président, il était "temps (...) de regarder cette histoire en face".
Plusieurs associations de défense des droits de l'Homme avaient cependant regretté cette intervention tardive. "On attendait un grand discours à la nation au lendemain de l'élection (...) sur la fierté d'être Français", a ainsi déploré Alain Jakubowicz, le président de la Licra.
AFP